|
Rémise officielle
|
Ecriture |Télé-Enseignement |Identité
|
Sebeden
|
Contacts |
Doyen CEDEAO
|
Kaaba |
|
N'ko literacy |
Société en Afrique
| Le
Centre |
Cairo_university| kafa
serede |
Inventeur
|
Préface
|
THEME : LES LANGUES LOCALES ET
L’IDENTITE AFRICAINE
LOCAL LANGUAGES AND AFRICAN IDENTITY
Par Mr:
Mahamadou Sangare
ߒߞߏ ߡߊߟߌ߫ ߡߊ߬ߟߌ ߡߊ߬ߟߌ߬ߓߊ
Professeur Principal
Mathématiques/Informatique/N’Ko
Lycée Monseigneur de Montclos de
Sikasso
BP. : 114 ; Sikasso – Tél. +223 620 214
Rép. MALI
1 fr.
2 fr.
3 eng.
N'ko Maliba la
L’identité
culturelle
L’identité culturelle est un concept anthropologique qui
désigne une période historique pendant laquelle une communauté, un peuple se
reconnaît par des valeurs précises dans ses pratiques, ses concepts, ses
pensées, ses croyances, son art etc.
Ainsi l’identité culturelle se définie dans le temps et
dans l’espace car les valeurs qui la déterminent ont un caractère dynamique,
évolutif dans le temps.
On ne saurait citer avec précision et de façon exhaustive
les valeurs qui permettent d’identifier un peuple en un moment de son
histoire.
Pour l’Afrique, une mosaïque de peuples et de communautés
qui se partagent un passé récent marqué par l’esclavage et la colonisation
ne saurait se vanter aujourd’hui d’une culture authentiquement africaine
exprimant encore son identité.
Cependant, l’espoir est permis. Les possibilités d’une
reconquête de notre identité existent.
Les langues africaines
La langue est l’ensemble des unités du langage parlé ou
écrit propre à une communauté ; le langage étant cette faculté que nous
avons de communiquer entre nous et d’exprimer nos pensées.
Définie de cette façon l’Afrique compte plus de 1000
langues. Ainsi l’Afrique serait le continent qui compte plus de langues avec
une forte densité en Afrique Subsaharienne. Dans la plupart des cas elles
sont pratiquées par quelques villages seulement et même souvent par un seul.
Malgré cette diversité apparente, il existe des affinités
réelles entre la plupart de ces langues. Toutes ces langues dériveraient
d’un petit nombre d’entre elles. Il est du domaine des Sciences Humaines de
consolider les ressemblances linguistiques pour couper cours à une
exploitation des différences observées.
La reconquête de notre identité culturelle passe donc par
une étude épistémologique et historique de nos langues. Toutes nos langues
font référence à des formes littéraires, des symbolismes et des techniques
de production de biens et services.
La langue fonde l’identité culturelle
Ainsi, la langue est le pilier de la culture. A ce sujet, je
me permettrais de citer un éminent spécialiste de la culture africaine, le
Malien Seydou Badian KOUYATE qui disait « … Par la langue, nous avons ce que
le passé nous a laissé comme message et ce que le présent compose pour nous.
C’est la langue qui nous lie, et c’est elle qui fonde notre identité. Elle
est un élément essentiel et sans la langue il n’y a pas de culture. La
langue nous aide à tout interpréter » et il continue « …. Nous étions des
dominés, des colonisés et la langue a été pour nous un facteur de
libération. ». C’était lors du Colloque International d’Alger en mi-avril
« LANGUES, CULTURE ET TRADITION » organisé par la Faculté des Lettres et des
Langues. Il serait donc important de veiller à la survie de nos langues en
tant qu’élément culturel même si leur survie dépend de l’intérêt que les
peuples qui les pratiquent ont pour elles.
Il est important de signaler la mobilité et la flexibilité
constantes d’une langue. C’est la raison pour laquelle j’oppose une étude
historique de nos langues pour en extraire la substance utile à un appel pur
et simple à elles pour exprimer notre identité.
L’Afrique ne saurait se dispenser d’échanger avec les autres
continents. Notre identité s’exprimerait mieux à travers une réelle
ouverture sur les autres continents aujourd’hui car leur influence sur nos
langues est irréversible ; esclavage et colonisation obligent.
En effet, nos dirigeants et intellectuels actuels sont les
fruits de cette école coloniale.
Les épigones et les détracteurs d’une identité africaine
Au cours de la période de colonisation (même après) l’école
était la seule référence dans l’éducation et la formation des enfants.
L’éducation familiale était reléguée au dernier plan nos parents étant
considérés comme des sauvages. Tous les enfants qui avaient la chance
d’aller à l’école ne réfléchissaient plus que par l’école. Ils étaient
séparés ainsi et progressivement de leur racine culturelle.
Les programmes enseignés à cette époque (hélas même
actuellement encore dans bien de cas) ne pouvaient prendre en compte les
facteurs culturels de nos milieux parce que calqués sur des modèles
étrangers véhiculant une culture étrangère à nos réalités locales. Nos
seules références historiques et culturelles étaient les étrangers, les
nôtres n’étant que des sanguinaires et des sauvages dit-on. C’est l’occasion
pour moi de citer un autre éminent spécialiste des langues africaines du
Centre Amadou Hampaté BA (CAHBA) de Bamako, Iba N’Diaye qui disait « …nous
pratiquons à longueur de journées, un déni de reconnaissance de la riche et
complexe contribution de nos ancêtres en matière de cultures, de langues et
même d’écritures. ». L’étude de nos langues est d’autant plus importante que
sa négligence soit l’une des principales sources de la misère économique de
nos populations. « Les élites ayant la charge de concevoir les modèles de
développement et les projets de société, puis de mobiliser les populations
illettrées et les ressources intérieures et extérieures autour de ces
modèles et projets ne savent même pas comment présenter valablement leurs
idées, approches, méthodes de travail, de gestion et d’évaluation à nos
communautés. » C’est pour cela nos pères avaient raison de dire : « C’est la
façon de poser un problème qui en facilite la résolution et c’est la façon
de le poser qui en complique la résolution ; alors que dire de celui qui n’a
pas une façon de poser son problème ? ».
Ainsi, les intellectuels africains (les instruits) ont
pendant longtemps constitué un obstacle majeur à l’évolution de nos langues
locales avec l’argument qu’elles ne permettent pas d’exprimer une pensée
scientifique.
« La réhabilitation des langues africaines n’a rencontré des
conditions relativement propices que dans les territoires anciennement
colonisés par les Anglais. Outre les motivations se rapportant à la liberté
et à la dignité des peuples… les facteurs qui ont facilité cette
réhabilitation furent la politique linguistique moins coercitive de
l’occupant britannique et la standardisation de ces langues. Il résulte
toutefois que très peu de grandes langues véhiculaires de l’Afrique pré
coloniale ont retrouvé leur rang international d’antan. »
L'alphabet N'Ko et les domaines du savoir pour la reconquête
d’une identité perdue
En avril 1949, Souleymane KANTE inventa un système
d'écritures phonétiques capable de transcrire toutes les langues et en
particulier les LANGUES A TONS.
Son père, grand ULEMA, est fondateur d’un établissement
scolaire coranique à SOUMANKOÏ (Guinée) où
fréquentaient plus de trois cent (300) élèves, venant de tous les coins de
l'Afrique de l'Ouest ; il y avait également des dizaines de disciples qui
venaient parfaire leur instruction.
Le savant Souleymane baptisa son système "ALPHABET N'KO" ;
d'une part en guise de souvenir pour l'école de son père, car le seul terme
commun à tous les dialectes parlés par les élèves de l'établissement était
"N'KO" ; d'autre part cette dénomination rappelle les propos de SOUNDJATA KEÏTA,
Empereur des MANDING qui, en 1236, s'adressant à la légion disait "Vaillants
Soldats tous ceux qui utilisent le "N'KO", que vous le soyez ou pas, c'est à
vous que je m'adresse sans exception"
Il ressort donc que "N'KO" est un terme unificateur.
L'alphabet N'Ko s'écrit de droite à gauche compte tenu de beaucoup de
facteurs.
Le mouvement N’Ko est donc un esprit et une écriture. Son
alphabet est composé de 27 lettres dont 7 voyelles, 19 consones et 1 neutre.
Cette écriture contient en outre, les mêmes chiffres que le français et le
système des opérations reste le même. La seule différence réside dans les
noms et les symboles employés pour les écrire. Ces 27 lettres permettent
d’écrire les 4 langues tonales de l’aire géographique et culturelle N’ko qui
sont : le mandenkan, le bamanankan, le mandekokan et le dioulakan. En plus,
l’alphabet N’Ko a une extension constituée de consonnes accentuées
permettant d’écrire des sons qui ne sont pas normalement émis par les
pratiquants des langues précitées. Cette écriture, finalement une langue
porte le nom de N’Ko ; une sorte de lingua franca sous régional couvrant le
Mali, la Guinée, le Sénégal, le sud de la Mauritanie, le Burkina Faso, la
Côte d’Ivoire,… presque tout le territoire de la CEDEAO.
Le N’ko, une belle « langue » riche par sa diversité est
restée orale pendant longtemps. Elle s’est débattue à travers des siècles
pour se hisser à la dimension des grandes langues avec elle de grandes
civilisations.
Force est de constater que le mouvement N’ko ne s’est pas
limité à l’écriture. Il a fait un effort de parcourt épistémologique et
historique qui l’a conduit en toute fierté et en toute beauté aux fondements
culturels de cette vieille civilisation. L’étude de la structure syntaxique
des termes N’ko a permis d’identifier plus de 300 mots d’origine arabe sans
compter ceux d’origines diverses. Aussi a-t-il mis en évidence l’existence,
dans cette langue, des moyens d’expression d’une pensée scientifique,
artistique, administrative, militaire, politique, etc.
Aujourd’hui, cette langue (écriture) avance à grand pas vers
une véritable langue de développement. Dans le domaine scientifique,
administratif et juridique en terme de concepts et de lexique les résultats
sont incontestables. Exemples : le tableau de Mendeleïev est entièrement
transcrit, des brochures de mathématiques de base existent, des lexiques et
dictionnaires scientifiques aussi. Une dizaine d’Instituts N’Ko existent à
travers le monde (Guinée, USA, Egypte notamment). Plus de sept (7) sites
Internet N’Ko existent dont 1 entièrement en N’Ko qui fournissent des cours
d’initiation en N’ko sur le Net. Un journal trimestriel existe « Yelen
foobe ».
A chacun sa révolution culturelle
Dans les années 1530 la France serait au stade où nous
sommes aujourd’hui. Il aurait fallu qu’un certain Academos, un riche citoyen
français, intervienne pour mettre de l’ordre dans la langue française en
rassemblant tous les spécialistes de langue en un lieu (chez Academos) pour
standardiser le français. C’est cette assemblée qui aurait donné son nom à
l’académie telle que nous la connaissons aujourd’hui (Chez Academos =
Academia).
Une Académie des langues africaines vient de naître dans
l’espace CEDEAO à Bamako au Mali.
Mali : ses langues et sa culture réhabilitées
Politique nationale des langues
Le Mali parle plus d’une trentaine de langues parmi
lesquelles 15 sont retenues officiellement dont 13 sont des langues
nationales et 2 des langues étrangères.
Les langues nationales sont : le
bamanankan (bambara) est parlé par plus de 4 millions de personnes
(la majorité), le bomu, le
bozo, le dogosso, le
fulfulde, le hasanya
, le kasonkan, le mamara,
le madenkan, le soninkara,
le songayi, le syenara
et le tamasek. Les langues étrangères sont : le
français et l’arabe,
le français étant la langue officielle.
Pour la promotion des langues et pour améliorer le taux
d’alphabétisation de la population nationale qui oscillait autour des 30%,
le gouvernement malien a créé la Direction Nationale de l’Alphabétisation
Fonctionnelle et de la Linguistique Appliquée (DNAFLA).
La mission de cette institution est de faire la promotion
des langues retenues et de faire d’elles des outils de développement.
Ce programme a permis la production de syllabaires, de
dictionnaires, de lexiques, de brochures et manuels de formation dans les
différentes langues retenues. Ces langues s’adaptent et sont aptes à
soutenir valablement les programmes de développement de nos jours.
Pratiquement tous les milieux paysans ont bénéficié de programme
d’alphabétisation approprié et adapté à leur cadre de vie leur permettant
ainsi de changer de comportement et de participer de façon efficace au
développement endogène.
Aujourd’hui, le Mali compte plus de 8000 centres
d’alphabétisation répartis entre 6132 villages. Le nombre d’alphabétisés,
sortis de ces centres est officiellement évalué à 1.205.905 qui participent
activement aux efforts de développement de leurs milieux (relevés
pluviométriques, traitement des champs, enrichissement des sols cultivables,
enregistrement des naissances et des décès, agents sanitaires, secourisme,
etc.).
Satisfait des résultats obtenus par le programme, l’état
malien a amorcé une intégration progressive de nos langues dans le programme
officiel de l’éducation. Ainsi 109 écoles primaires bénéficient de centre
expérimentation d’une nouvelle pédagogie dite Pédagogie Convergente (PC) qui
consiste à commencer à enseigner en langue nationale tout en introduisant
progressivement le français. Les résultats sont encourageants. Exemple :
dans un Centre d’Animation Pédagogique (CAP), les Centres PC ont réalisé un
taux de réussite de 76,62% contre 56,35% pour tout le PC à l’examen de fin
d’étude primaire aux termes de l’année scolaire 2000-2001.
S’il est vrai que l’espoir est permis, il est aussi vrai que
beaucoup reste à faire.
Des difficultés réelles se situent au niveau des concepts,
du lexique faute de standard en écriture et en lecture. On constate que
l’écriture adaptée dans la plupart des cas est une écriture qui ne tient pas
toujours compte de la structure étymologique des mots mais de leur vocale.
Ainsi, selon le milieu le même mot en bamanankan s’écrirait de façons
différentes. La structure grammaticale n’est pas étudiée en profondeur
donnant cours à des confusions souvent mal à propos. Dans beaucoup de cas on
sent le français traduit mot à mot. Je ne parlerais pas des difficultés
d’interprétation des concepts scientifiques (calculs, sciences de la nature,
sciences physiques et chimies, etc.).
Cependant, des résultats de recherche par des Réseaux et des
Mouvements culturels indépendants sont rassurants sur ces plans.
Actions indépendantes : L’alphabet du Réseau CAHBA
Les linguistes et spécialistes du Centre Amadou Hampaté Ba (CAHBA)
ayant travaillé à la conception de l’alphabet dit CAHBA ont introduit la
possibilité d’une distinction des « tonalités », en exploitant autrement les
lettres majuscules et les lettres minuscules de l’alphabet latin. Ce qui
réduit tout risque de confusion autour de l’étymologie du nom ou du mot dans
la langue d’origine. Cet alphabet s’applique à toutes les langues du Mali.
C’est dans le souci de faire des langues locales du Mali des
outils de développement que le Réseau CAHBA a étudié plus en profondeur nos
langues et leur histoire, nos symbolismes et nos formes littéraires (orales
et écrites), nos techniques de production de biens et services auxquelles
les langues font référence. Aussi, a-t-il travaillé sur les alphabets
(séculaires et sacrés) utilisés chez nous, au point de concevoir des projets
de dictionnaires, des modules pour alphabétiser des villageois auprès
desquels il collecte et apprend des concepts internes.
Une proposition concrète
Aujourd’hui, il est nécessaire d’étudier nos langues dans
leur essence afin de faire d’elles des langues de développement endogène.
C’est-à-dire :
Faire une étude historique des langues pour en dégager les
concepts administratifs, juridiques, économiques, sociologiques,
scientifiques, pédagogiques, … par une analyse appropriée de la structure
des mots, locutions,… selon la langue (dans beaucoup de cas un grand pas a
été fait).
Développer une écriture rendant parfaitement les tonalités
de nos langues véhiculaires selon la famille linguistique (un patrimoine
existe déjà ; il suffit de l’exploiter avantageusement).
Standardiser les langues retenues comme langues nationales
ou sous régionales. Cette étape est essentielle. Elle nécessite
l’implication des populations rurales encore attachées à leur tradition. Un
mouvement d’échange de vue, caractérisé par le donné et le recevoir, se
constituera entre les populations et les spécialistes : les aptitudes de
base (écriture, lecture, calcul et leur application à la production) dans la
langue locale s’échangeront contre les fondements culturels de nos valeurs
anciennes. (Des expériences existent).
Développer une véritable politique linguistique au niveau
des états pour traduire tous ces efforts/acquis en terme d’outils de
développement.
Procéder à une reforme des systèmes éducatifs où les
résultats de ces études seront mis au service de l’éducation de base pour
faciliter l’assimilation des concepts scientifiques chez les enfants à bas
âges et de raccourcir la durée de l’enseignement fondamental. Ainsi à partir
de 5 ans déjà un enfant pourra accéder aux concepts scientifiques contre 15
de nos jours. Il s’agit d’une révolution de l’école si chère au Dr Daniel
Tchapda Piameu de Daoula Professeur de Philosophie et Correspondant du Syfia
(Système francophone d’information agricole) pour le Cameroun.